INJONCTION DE PAYER : COMMENT LES CONTESTER, MEME TARDIVEMENT ?

Commercial - 10/02/2023

INJONCTION DE PAYER : COMMENT LES CONTESTER, MEME TARDIVEMENT ?

Illustration avec un arrêt récent rendu par la Cour de cassation jugeant l'action du créancier prescrite comme étant tardive (Cass. Civ. 2e, 19 sept. 2022, 20-18.772)

L'ordonnance en injonction de payer n'est pas une décision de justice comme les autres


Un arrêt de la Cour de cassation passé relativement inaperçu vient rappeler la valeur relative de l’ordonnance en injonction de payer.

En tant que décision ayant été rendue de manière non contradictoire, elle est non seulement susceptible d’être remise en cause par une simple opposition du débiteur, mais qui plus, est, nous enseigne l’arrêt en cause, elle ne bénéficie pas des dispositions relatives à l’interruption des prescriptions dont sont dotées les autres titres exécutoires.


L'affaire, qui portait au départ sur un crédit à la consommation très ancien, était somme toute assez banale.

Une affaire qui s’apparente à beaucoup d’autres affaires dans lesquelles des injonctions de payer sont rendues.

Les faits étaient les suivants.


Qu'est ce qui a justifié l'ordonnance en injonction de payer rendu ?


Une Ordonnance portant injonction de payer diverses sommes à un établissement bancaire a été rendue le 29 mai 2015


Rappelons le, l'ordonnance portant injonction de payer est une décision rendue par le Président du Tribunal sur requête du seul créancier.


Aucune audience ne se tient donc, et les vérifications faites par le Juge sont sommaires à ce stade, puisqu'il vérifie simplement l'apparent bienfondé de la demande (contrat, dette, relance, intérêts éventuels...etc) et rend une ordonnance qui est susceptible d'opposition par le débiteur.


Dans le cas présent, à l’initiative du créancier, l’ordonnance a été notifiée au débiteur.


Mais, et cela a son importance, l’huissier ne parvenant pas à mettre la main sur le débiteur, celle-ci a été signifiée par dépôt en l’étude de l’officier public le 22 juin 2015.

Aucune opposition n’a été formée dans le mois suivant cette signification, de sorte que la formule exécutoire a été apposée sur l’ordonnance en application de l’article 1422 du code de procédure civile.

Le temps a passé et, le 12 février 2019, l’ordonnance a été à nouveau signifiée à l’initiative de l’établissement bancaire, mais cette fois-ci, la signification a été faite à personne.

Une opposition à injonction de payer formée par le débiteur 5 ans après l’ordonnance rendue


Le 7 mars 2019, le débiteur a alors formé une opposition.

En effet, en l’absence de signification à personne de l’ordonnance portant injonction de payer, l’opposition reste recevable jusqu’à l’expiration du délai d’un mois suivant le premier acte signifié à personne ou, à défaut, suivant la première mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponibles, en tout ou partie, les biens du débiteur (Code de Procédure civile art. 1416).

C’est la raison pour laquelle, certaines personnes qui parfois ont déménagé ou ont changé de travail prennent connaissance seulement des années plus tard de l’ordonnance qui a été rendue à leur rencontre sur demande d’un organisme de crédit à la consommation, ou d’une agence de recouvrement. (FILACTION, INTRUM JUSTITIA...etc)

C’est uniquement lorsqu’une saisie attribution sera effectuée sur leur compte, ou qu'une saisie sur salaire sera effectuée à leur rencontre, que ces personnes prendront connaissance de l’ordonnance en injonction de payer en question.

Il est alors impératif pour elles de former opposition, car bien que peu de gens le savent, cette opposition sera toujours possible dans un délai d’un mois à compter de la mesure d’exécution, si la personne ne s'est pas vue remettre personnellement avant cela et par ici de justice l’ordonnance rendue à son encontre.


En revanche, si la personne laisse passé le délai d'un mois en question, l'ordonnance deviendra définitive...


Quelle solution sera apportée au litige ?


Le débiteur va habilement invoquer la prescription de la créance de l’établissement bancaire.

Le tribunal judiciaire d’Annecy n’a cependant pas fait droit à ce moyen de défense et a estimé qu’en l’absence d’opposition dans le délai d’un mois, l’ordonnance produisait tous les effets d’un jugement contradictoire sans qu’il y ait lieu de la signifier à nouveau pour la rendre exécutoire, de sorte qu’il s’agissait d’un titre exécutoire soumis à la prescription décennale de l’article L. 111-4 du code des procédures civiles d’exécution.


Grâce à cette interversion des délais de prescription, la créance de l’établissement bancaire était ainsi sauvée de l’écoulement du temps.

La Cour de cassation n’a pas partagé cette manière de voir les choses.

Elle va censurer le jugement après avoir relevé d’office que :


« l’opposition régulièrement formée ayant pour effet de saisir le tribunal de la demande du créancier et de l’ensemble du litige sur lequel il est statué par un jugement qui se substitue à l’injonction de payer, les dispositions de l’article L. 111-4 du code des procédures civiles d’exécution, relatives au délai d’exécution des titres exécutoires, n’étaient pas applicables à la prescription de la créance de la banque ».

La prescription est donc acquise au débiteur, qui n’aura pas à rembourser l’établissement de crédit, lequel a trop tardé pour faire exécuter l’Ordonnance en injonction de payer dont il disposait.

Cette position vient protéger les personnes faisant l’objet d’Ordonnances en injonction de payer, en rappelant qu’il ne s’agit pas de titres exécutoires assimilables à des jugements.

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