VICES CACHES AUTOMOBILES

Droit auto - 07/10/2022

VICES CACHES AUTOMOBILES

Comment être indemnité par le vendeur du véhicule atteint d'un vice caché ?

Qu’est-ce que l’action en garantie des vices cachés ?


Cass. Civ 1ère 8 avril 2021, F-P n°20-13.493


L'arrêt ci dessus permet de revenir sur les conditions et l'intérêt de l'action en garantie des vices cachés en matière notamment de ventes automobiles.


Le vice caché est défini par l’article 1641 du Code civil comme un défaut non-apparent sur un bien vendu, qui le rend totalement ou partiellement inutilisable, en tout cas pour le but dans lequel il a été produit.

Prenons un cas très simple, un client achète un congélateur dont l’étanchéité est insuffisante, nécessitant une plus grande consommation d’énergie pour conserver les aliments, le client n’aurait jamais acheté un congélateur si énergivore.

Cette règle est tout à fait transposable à l’achat d’une voiture.

Dans ce cas l’acheteur, s’il en avait été conscient, ne l’aurait pas acheté.

En cas de découverte de vices cachés dans un bien acquis, une action en garantie est accordée par la loi à l’acquéreur contre le vendeur, dans un délai de deux ans après la découverte du vice, comme le prévoit l’article 1648 du Code civil.


Comment ces règles s’appliquent-elles dans le cadre d’une chaîne de contrats ?


L’arrêt d’espèce porte sur la vente d’un véhicule.

L’acquéreur d’un véhicule décide de le revendre le 11 juin 2013 à un couple, qui va se rendre compte de l’existence d’un vice caché, et vont assigner en référé le vendeur en novembre 2014.

Le vendeur va, par la suite, appeler le fabricant en garantie des vices cachés le 3 janvier 2017.

La Cour d’appel de Nîmes, le 19 décembre 2019, va déclarer que l’action de l’acquéreur intermédiaire en garantie contre le fabricant était prescrite, et qu’à ce titre le couple ne pouvait donc pas agir contre cet acquéreur.

La Cour de cassation n’est pas de cet avis.


Pourquoi la Cour garantie la sécurité des chaînes de contrats ?


La Cour de cassation va infirmer cette décision.

En effet, les acquéreurs avaient bien agi contre le vendeur intermédiaire dans les deux ans suivant la découverte du vice, et dans les 5 ans après l’acquisition du véhicule.

Les acquéreurs étaient donc fondés à agir contre le vendeur intermédiaire, et ce, même si le vendeur intermédiaire ne disposait pour sa part, plus de la possibilité d’agir contre son propre vendeur, en l’occurrence le fabriquant.

Cette décision peut paraître injuste pour le revendeur intermédiaire, qui ne pouvait pas avoir connaissance du risque pour lui avant que l’acquéreur final n’ait agir contre lui.

Oui, dit la Cour de cassation, mais en ce cas, le revendeur intermédiaire doit agir contre le fabriquant immédiatement après avoir été lui-même actionné, ce qui n’était pas le cas dans l’espèce ayant donné lieu à l’arrêt de la Cour de cassation.

En effet, à bien y regarder, le vendeur avait été assigné, certes en référé, mais assigné tout de même dès 2014, et ce dernier a pourtant attendu 2017 pour assigner à son tour le fabriquant en garantie.

S’il avait attrait à la cause le fabriquant immédiatement, il ne se serai certainement pas vue opposer cette règle de rigueur.

Surtout, la règle contient une forme de logique : puisque l’action en garantie des vices cachés de l’acquéreur finale est enfermée dans un délai de 5 ans, l’acquéreur intermédiaire n’a pas à disposer d’un délai plus long, surtout que lui dispose de la qualité de professionnel, sans quoi il ne pourrait pas acheter pour revendre des biens, activité réservée aux commerçants.

Le professionnel est qui plus est assuré, et même s’il doit supporter la perte, elle sera normalement toujours moins lourde que celle que devrait supporter le consommateur final.


En quoi cette décision apporte-t-elle une solution pragmatique ?


Là où la Cour d’appel se basait sur une conception stricte de la chaîne de contrats, considérant que l’action se prescrit à compter du contrat initial, les derniers acquéreurs n’étaient pas fondés à agir.

Le fait que la prescription de l’action d’un vendeur intermédiaire contre un fabricant soit atteinte n’a aucun effet sur le délai de prescription de l’action en vices cachés contre ce vendeur intermédiaire.

De manière implicite, elle pose un principe d’individualité des maillons de chaîne, en matière d’action en vices cachés.

En d’autres termes, la prescription repart à 0 lorsque l’acquéreur devient vendeur intermédiaire.

La solution contraire signifierait que le vice caché ne peut plus être invoqué par l’acquéreur final, si le vendeur initial s’en est dessaisi, et que le vendeur intermédiaire de la voiture en a eu également connaissance, ce qui serait source d’insécurité juridique.

La solution est donc protectrice du dernier acquéreur, et elle est pragmatique, au sens où il est logique que tout acquéreur puisse agir en garantie des vices cachés contre le vendeur intermédiaire, quand bien même le délai de prescription est acquis à l’encontre du vendeur initial.

De plus, même si l’on ne sait rien de la connaissance du vendeur intermédiaire de ce vice caché, la décision est logique également du point de vue de l’article 1643, qui n’exige pas la connaissance du vice par le vendeur pour que l’acheteur puisse agir.

Ainsi, pour résumer, l’acheteur peut toujours agir, dans les délais, contre le vendeur à qui il a eu affaire, peu importe si ce vendeur l’avait acquis longtemps auparavant auprès d’un autre vendeur.

Ce qui compte, c’est uniquement la relation contractuelle qui lie le vendeur intermédiaire et le sous-acquéreur.

Voilà qui est dit !


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