Poursuites de l'URSSAF

Commercial - 02/04/2020

La mise en demeure de l’URSSAF doit obligatoirement indiquer le délai pour procéder au paiement des sommes réclamées

Le contentieux relatif au règlement des cotisations sociales URSSAF est considérable.

Celui qui a trait au formalisme de la mise en demeure l’est presque tout autant.

Et pour cause, puisque l’URSSAF dispose d’un pouvoir exorbitant du droit commun, lui permettant, en cas de somme qu’il considère impayé de la part du redevable, d’émettre une contrainte qui, si elle n’est pas contestée, aura valeur de titre exécutoire, et pourra faire l’objet de mesures d’exécution forcée (par exemple une saisie-attribution, ou encore une saisie-immobilière, le cas échéant)

S’agissant de la mise en demeure le respect du formalisme revêt une grande importance comme le démontre une nouvelle fois un arrêt de la Haute juridiction en date du 19 décembre 2019 (Cass.civ, 2e 19 décembre 2019 n° 18-23.623).

Pourquoi la société contestait les sommes réclamées par l’URSSAF ?

En l’espèce, une société a fait l’objet d’un contrôle inopiné des services de l’URSSAF en décembre 2013.

Par la suite, en janvier 2014, l’URSAFF lui a adressé une lettre constatant une situation de travail dissimulé et indiquant à ce titre un redressement basé sur une taxation forfaitaire pour la période comprise en le 1er janvier 2010 et le 17 décembre 2013.

La notification de la mise en demeure est parvenue à la société le 7 mai 2014.

La société a cependant formé un recours, dans le délai ouvert à cet effet, et ainsi saisi un Tribunal de sécurité sociale. (Les tribunaux de sécurité social ayant depuis lors été absorbés par les Tribunaux judiciaires).

Après jugement, un appel est formé.

La Cour d’appel rejette la demande de nullité de la mise en demeure formulée par la société en retenant que la lettre valant mise en demeure en date du 7 mai 2014 portait à la connaissance de la société la voie et les conditions de recours dont elle disposait à l’encontre de celle-ci.

Par ailleurs, la Cour d’appel retient que bien que le délai de paiement n’y fût pas expressément formulé, celui-ci est nécessairement, au mieux, d’un mois à compter de la date de réception de la mise en demeure puisque toute contestation doit être formée dans le délai d’un mois suivant cette date.

La Cour de cassation casse l’arrêt rendu et énonce que la juridiction de second degré n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations en raisonnant ainsi.

Dès lors, la Cour d’appel a violé l’article 244-2 du Code de la sécurité sociale.

L’article L244-2 du Code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable à la mise en demeure litigieuse pose l’obligation d’envoyer un avertissement par lettre recommandée, invitant l’employeur ou le travailleur indépendant à régulariser sa situation dans le mois.

Il s’agit en effet d’une des formalités que doit remplir un tel avertissement ou mise en demeure, outre la mention de la cause, de la nature, du montant des sommes réclamées ainsi la période à laquelle elles se rapportent (article R 244-1 du Code de la sécurité sociale).

De manière générale, la Cour de cassation semble tenter de trouver un équilibre entre le respect des exigences de transparence et d’information incombant à l’URSSAF et la connaissance suffisante par le débiteur de l’étendue de son obligation.

En effet, dans un arrêt en date du 10 novembre 2011 (n°10-22.775), la Haute juridiction avait par exemple retenue que l’URSSAF pouvait se contenter de renvoyer aux détails contenus dans la lettre d’observation quand celle-ci comporte l’ensemble des éléments permettant au cotisant de connaitre la nature, l’étendue et la cause de son obligation en indiquant notamment le montant des cotisations et des majorations de retard afférentes ainsi que le délai imparti au débiteur pour s’acquitter des cotisations dues.

Toutefois, le cas d’espèce vient sanctionner plus durement l’absence de formalisme précis, ce qui est une position salutaire, dans la mesure où, comme dans d’autres droits tels que le droit social ou le droit de la consommation, on constate en la matière une asymétrie dans l’information dont disposent les parties : l’URSSAF est un professionnel rompu à la matière, quand les indépendants et sociétés assujetties ne maîtrisent pas l’ensemble des règles, il faut le dire, arides, du droit de la sécurité sociale, et que c’est bien la moindre des exigences que de demander à celui qui est partie et émetteur du titre d’informer le défendeur des délais dont il dispose pour s’acquitter de la dette réclamée.

I - Sur la nécessaire mention du délai de paiement

Le document de mise en demeure possède un caractère indispensable dans le cadre d’un contentieux URSSAF.

Ainsi, l’arrêt commenté apporte une précision importante quant au formalisme attendu de la mise en demeure d’un cotisant.

Il est à ce titre essentiel qu’un tel acte mentionne expressément le délai d’un mois laissé à l’employeur pour procéder au paiement de sa dette de cotisation.

La Cour de cassation avait déjà eu l’occasion de prononcer la nullité d’une mise en demeure pour absence de formalisme en ce qu’elle « ne faisait pas mention du délai imparti » (Cass.civ, 2e, 31 mai 2005, n°03-30.658).

Une telle solution apparait logique puisque ce document constitue une invitation impérative adressée au débiteur d’avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti.

La mention expresse de ce délai semble donc être nécessaire pour une information complète et efficace de ce dernier.

En l’espèce, la Cour d’appel retient notamment que le document de mise en demeure mentionnait expressément l’article L 244-2 du Code de la sécurité sociale qui indique l’étendue du délai laissé au débiteur pour payer.

Par ailleurs, elle fait valoir à l’appui de sa décision que le délai d’un mois laissé pour le paiement serait évident puisque la contestation devant la commission de recours amiable de l’URSSAF doit être formée dans un délai d’un mois à compter de la réception de la mise en demeure.

Toutefois, le simple visa de l’article applicable au cas d’espèce ne suffit pas à l’information du débiteur qui reçoit un document l’adjoignant de verser un règlement et ne répond pas aux exigences du texte susvisé.

L’ensemble des autres mentions figurant sur le document ne suffit pas à pallier l’omission de la mention du délai, puisque celle-ci n’autorise pas d’alternative comme l’a rappelé la Cour de cassation dans l’arrêt commenté.

II - Sur les conséquences de la nullité de la mise en demeure

Il résulte de cette décision que la mise en demeure est nulle.

L’enjeu est de taille.

En effet, si les sommes réclamées sont prescrites, l’URSSAF ne pourra pas régulariser la situation en renvoyant une nouvelle mise en demeure comportant les indications requises par la loi.

Cet arrêt, remarqué et remarquable, vient donner de l’importance aux garanties accordées au cotisant dans le cas d’un contrôle URSSAF.

Cette précision émanant de la Haute juridiction et tendant au respect strict du formalisme énoncé par la loi semblait nécessaire notamment face à une récente décision rendue par la Cour d’appel de Paris, aux termes de laquelle il était considéré, tout au contraire de la position émanant de la Cour de cassation, que :

« si la mise en demeure ne mentionne aucun délai de paiement des cotisations litigieuses, le visa de l’article L244-2 du code de la sécurité sociale qui prévoit un délai d’un mois est suffisante pour l’information du débiteur ». (CA de Paris, Pôle 6, chambre 12, 17 mai 2019, n°17/15105).

Que nenni, dit la Haute juridiction !

Le délai laissé au débiteur, quand il est correctement mentionné sur le document de mise en demeure, revêt un grand intérêt en ce qu’il incite le cotisant à régler sa dette le plus rapidement possible, avant la fin dudit délai.

Ce n’est donc pas la moindre des exigences que de s’assurer qu’il en a connaissance.

Ainsi, mieux un débiteur sera informé de l’étendue de son obligation, mieux il pourra régulariser sa situation.

Voilà ce pourquoi la Cour de cassation sanctionne l’URSSAF, et exige d’elle plus de rigueur !

Maître SALAGNON, Avocat associé au sein du cabinet BRG Avocats (Nantes-Paris), vous conseille, vous assiste et vous accompagne sur toute la France concernant les litiges vous opposant à l’URSSAF.


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