DECHEANCE DE TERME D'UN PRET : LA CLAUSE DE DECHANCE DU TERME SANS MISE EN DEMEURE PREALABLE PREVOYANT UN DELAI RAISONNABLE DE REGULARISATION EST JUGEE ABUSIVE !

Commercial - 16/06/2023

DECHEANCE DE TERME D'UN PRET : LA CLAUSE DE DECHANCE DU TERME SANS MISE EN DEMEURE PREALABLE PREVOYANT UN DELAI RAISONNABLE DE REGULARISATION EST JUGEE ABUSIVE !

Avec ces décions rendues d'abord par la Cour de Justice de l'Union europénne, puis par la Cour de cassation qui lui emboîte le pas, les emprunteurs de prêts immobiliers et les prêts à la consommation sont invités à contester les déchéances de termes abusives prononcées à leur encontre par leur banque CJUE 8-12-2022 aff. 600/21, QE c/ CRCAM de Loire-Atlantique et du centre ouest ; Civ. 1re, 22 mars 2023, FS-B, n° 21-16.476 ; Civ. 1re, 22 mars 2023, FS-B, n° 21-16.044

L’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne qui ouvre la voie à la reconnaissance du caractère abusif des clauses de déchéance du terme


Il s’agissait d’un arrêt très attendu par les banques et les clients des banques.

La Cour de cassation avait en effet, dans le courant de l’année 2020, interrogé la Cour de justice de l’Union européenne sur une question à la portée pratique extrêmement large et extrêmement importante dans les litiges bancaire survenus au sujet d’un crédit immobilier ou d’un crédit à la consommation.

La Cour de cassation souhaitait savoir dans quelle mesure les clauses résolutoires prévues dans les contrats de crédits, autrement appelées clause de déchéance du terme, lesquelles prévoient que lorsqu’une ou plusieurs échéances du crédit ne sont pas réglées, la banque pourra exiger la totalité du capital, outre des intérêts et des pénalités à son client, peuvent être considérés comme étant des clauses abusives.


Le premier enseignement de la Cour de justice de l’Union européenne est que pourla Cour européenne, la seule circonstance qu’une clause comporte une obligation expresse et non équivoque ne lui permet pas d’échapper au contrôle des clauses abusives (point 45) dès lors que la clause litigieuse ne porte pas sur l’objet principal du contrat (lesquelles, on le sait, échappent à ce contrôle lorsqu’elles sont claires et compréhensibles : Dir. art. 4).


La clause doit ainsi être examinée au regard de la réglementation sur les clauses abusives.

Le deuxième enseignement de la Cour de justice de l’Union européenne est que les critères qui doivent être pris en compte par le juge pour déterminer si la clause est abusive ne sont ni cumulatifs ni alternatifs.


C’est critères sont les suivants :


-La mise en jeu de la déchéance du terme dépend de l’inexécution d’une obligation présentant un caractère essentiel dans le rapport contractuel,


-L’inexécution en elle-même doit présenter un caractère suffisamment grave au regard de la durée et du montant du prêt,


-La faculté déroge au droit commun des contrats en la matière en l’absence de dispositions contractuelles spécifiques,


-Le droit national prévoit des moyens adéquats et efficaces permettant au consommateur soumis à l’application d’une telle clause de remédier à l’exigibilité du prêt.


Ainsi, considérer que les critères doivent être appréciés comme étant cumulatifs ou alternatifs reviendrait à restreindre l’examen du juge.


Le troisième enseignement de la Cour de justice de l’Union européenne est qu’il incombe au juge national d’examiner si, au regard de la durée et du montant du prêt, le manquement reproché au débiteur est d’une telle gravité qu’il justifie la faculté du prêteur de prononcer la déchéance du terme du prêt, rendant immédiatement exigibles les sommes dues.


Elle précise néanmoins qu’un retard de plus de 30 jours dans le paiement d’une échéance de prêt peut, en principe, au regard de la durée et du montant du prêt, constituer à lui seul une inexécution suffisamment grave du contrat de prêt.


Elle ne donne néanmoins pas de détail sur le délai pouvant être considéré comme satisfaisant, laissant cette appréciation aux juges nationaux.


La nouvelle position de la jurisprudence sur les clauses abusives de déchéance du terme des prêts bancaires


Faisant écho à cet arrêt rendu par la Cour de justice de l’Union européenne, la Cour de cassation va, très récemment, faire évoluer sa jurisprudence pour tenir compte du caractère potentiellement abusif des clauses insérées par les banques dans leurs contrats de prêts.

Dans deux arrêts rendus très récemment, la Cour de cassation va clairement exercer un rôle de vérification du caractère abusif des clauses de déchéance du terme.

Les faits des deux pourvois se ressemblaient.

Dans la première affaire (pourvoi n° 21-16.476), une banque consent à une personne physique par acte notarié du 4 décembre 2009 un prêt immobilier et qui comportait, en outre, une clause de soumission à l’exécution forcée immédiate.

La débitrice devient défaillante et la banque fait délivrer un commandement aux fins de vente forcée des biens hypothéqués.


Le 17 février 2020, le Tribunal saisi ordonne la vente forcée des immeubles concernés et fixe le montant de la créance de la banque.


L’emprunteuse forme un pourvoi en estimant que la clause prévoyant l’exigibilité immédiate des sommes dues au titre du prêt peut être qualifiée d’abusive au sens du code de la consommation.


Dans la seconde affaire (pourvoi n° 21-16.044), un second établissement bancaire consent le 22 juillet 2008 un prêt immobilier à un couple d’emprunteurs comportant une clause de déchéance du terme.


Après ladite déchéance, le créancier engage une procédure d’exécution forcée des immeubles appartenant aux emprunteurs.


Ceux-ci se défendent en soutenant, devant la juridiction saisie, le caractère abusif de la stipulation contractuelle considérée ainsi que d’une clause pénale insérée au contrat.

Dans cette seconde affaire, la cour d’appel saisie du litige exclut le caractère abusif de la clause stipulant la résiliation de plein droit du prêt en estimant que la déchéance du terme avait été prononcée après une première mise en demeure restée sans effet précisant le délai pour que les emprunteurs puissent s’y opposer.

Ces derniers décident donc de se pourvoir en cassation reprochant une méconnaissance de l’article L. 132-1 du code de la consommation.


Les deux arrêts de la première chambre civile de la Cour de cassation du 22 mars 2023 disposent d’une motivation particulièrement riche permettant de rappeler la position de la Cour de justice de l’Union européenne interprétant la directive 93/13/CEE sur les clauses abusives à propos des clauses de déchéance du terme.

Dans les deux cas, la Cour de cassation va casser les arrêts d’appel.

En effet, dans la première affaire, La Cour de cassation considère qu'est abusive, une clause prévoyant une soumission à l’exécution forcée immédiate en raison du manquement du débiteur à une seule échéance et permettant de prononcer la déchéance immédiate sans mise en demeure préalable ni préavis.

Qu’on se le dise donc enfin, la déchéance du terme d’un prêt, ou son exécution forcée ne peut pas être prononcée sans mise en demeure préalable.

Qu’on se le dise donc également, pour la Cour de cassation, La clause qui prévoit que l’emprunteur dispose d’une durée de 8 jours pour régulariser sa situation, à défaut de quoi la déchéance du terme de son prêt sera prononcé, est abusive.

Il faut en effet permettre à l’emprunteur , dit la Cour de cassation, de  bénéficier d’un délai raisonnable c'est-à-dire d’un délai suffisant, pour régulariser sa situation avant de prononcer une sanction si importante que la déchéance le terme du crédit, qui met fin au contrat.

Voilà l’exemple d’une évolution de jurisprudence, en plusieurs étapes, qui démontre la vivacité du droit de la consommation dans le paysage juridique actuel, et du rôle de la jurisprudence européenne dans la protection des emprunteurs consommateurs.


Nous l’aurons compris, les établissements bancaires sont désormais invités à porter la plus grande attention à la rédaction des contrats concernés !

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