Etat civil & opposition à mariage - 11/06/2025
Tribunal judiciaire de Nantes, 8e chambre, Jugement du 6 février 2025, n° RG 23/0341
Dans une affaire jugée récemment par le Tribunal judiciaire de Nantes, un couple marié à l’étranger s’est vu refuser la transcription de leur union sur les registres de l’état civil français.
Le ministère public, c'est à dire le Procureur de la République, invoquait des doutes sur la sincérité de leur union, notamment en raison de l'absence de certificat de capacité à mariage et de supposées incohérences dans leurs auditions respectives.
Ce refus, fondé sur l’article 171-7 du code civil, bloquait toutes les démarches administratives liées au mariage, notamment le regroupement familial et la reconnaissance de l’union en France.
Le couple a donc assigné le ministère public en justice afin de faire reconnaître la validité de leur mariage et obtenir sa transcription via notre cabinet d'avocats.
L’article 12 de la Convention européenne des droits de l’homme garantit à chacun le droit de se marier.
Mais ce droit n’est pas absolu : les États peuvent encadrer ses modalités pour prévenir les mariages frauduleux.
Le Code civil prévoit notamment qu’un mariage célébré à l’étranger par un ressortissant français doit être précédé de la délivrance d’un certificat de capacité à mariage (article 171-2).
Si le mariage est intervenu sans ce certificat, le Procureur peut bloquer la transcription sur les registres de l'état civil.
La transcription est possible, mais soumise à l’appréciation du procureur, qui peut s’opposer s’il existe des indices de nullité du mariage (article 171-7).
Dans cette affaire, le procureur avait estimé que le mariage semblait « de pure complaisance » en raison d'un union célébrée au cours d’un premier séjour à l’étranger, absences de séjours réguliers postérieurs, et contradictions supposées dans les déclarations des époux.
Le Tribunal a examiné en détail les pièces versées au dossier. Parmi elles :
- Trois voyages documentés de l’époux dans le pays de son conjoint, chaque fois d’une durée de 20 à 27 jours ;
- Des échanges de messages, montrant une intimité partagée et des projets de vie commune ;
- Des attestations de proches, dont celle de l’enfant de l’un des époux, évoquant l’intégration du conjoint dans la famille ;
- Des photographies du couple, qui bien que non datées, illustrent une proximité réelle.
Le Tribunal a reconnu que certaines imprécisions existaient dans les déclarations (comme le fait que l’un des époux ignorait la date de naissance de l’autre), mais que cela ne suffisait pas à remettre en cause leur intention matrimoniale.
Il a rappelé que la crise sanitaire (COVID-19) avait empêché des voyages en 2022, justifiant l’absence de séjour cette année-là.
Extrait marquant du jugement :
« Il convient de souligner que M. X a déjà entrepris de séjourner une quatrième fois auprès de son épouse comme en attestent les billets d’avion pour un voyage prévu du 28 novembre 2024 au 6 mars 2025. Ces voyages témoignent ainsi de la persistance d’un maintien des liens entre les époux depuis la célébration de leur union. »
Le Tribunal a ainsi ordonné la transcription de l’acte de mariage, estimant que les éléments produits démontraient une relation sincère et continue, malgré les réserves initiales du ministère public.
Ce jugement est important car il montre :
- que le refus de transcription ne peut pas être fondé sur des suspicions vagues ou des approximations, mais nécessite une démonstration sérieuse de la fraude matrimoniale ;
- que le juge reste le garant des libertés individuelles, notamment du droit de se marier et de voir son union reconnue ;
- que les couples concernés doivent constituer un dossier solide : preuves de vie commune, voyages, témoignages, correspondances…
Il démontre également que l’absence de certificat de capacité à mariage ne ferme pas la porte à la transcription si l’union est authentique et que le couple décide d'exercer un recours pour voir ses droits reconnus.
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Maître SALAGNON, Avocat associé au sein du cabinet BRG Avocats (Nantes-Paris), et responsable du département droit civil/ état civil, vous conseille, vous assiste et vous accompagne sur toute la France concernant vos litiges.
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