Bancaire & voies d’exécution - 25/10/2024
Cour de cassation, Chambre commerciale financière et économique, 23 octobre 2024 pourvoi n° 23-16.267
Le spoofing est une méthode frauduleuse dans laquelle des escrocs usurpent l'identité d'un conseiller bancaire, parvenant même à afficher un numéro d'appel légitime de la banque.
Dans cette affaire, un client de BNP Paribas a été contacté par un faux conseiller, et s’est fait soutirer 54 500 euros via plusieurs virements frauduleux qu’il a lui-même validés sous l’influence trompeuse de l’escroc.
Pensant qu’il s’agissait d’une procédure de sécurité légitime, il a autorisé ces transferts frauduleux.
Après cette fraude, la victime a saisi la justice pour obtenir le remboursement des fonds perdus.
La Cour d’appel de Versailles, dans un arrêt retentissent, a d’abord fait droit à sa demande en rendant un arrêt favorable, concluant à la responsabilité de l’établissement bancaire et ordonnant le remboursement intégral des sommes détournées.
BNP Paribas a contesté cette décision en formant un pourvoi, demandant à la Cour de cassation de statuer sur la question de la "négligence grave" du client.
Dans son arrêt du 23 octobre 2024, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi de BNP Paribas, confirmant la décision de la Cour d’appel de Versailles.
Elle a retenu que la responsabilité de la banque devait être engagée et que la victime n'avait pas commis de "négligence grave".
En effet, la Cour de cassation a souligné que le mode opératoire utilisé par l'escroc avait mis la victime en confiance en affichant un numéro officiel de la banque, exploitant ainsi une faille dans les systèmes de télécommunication.
La banque n’a pas réussi à prouver que la victime avait manqué de vigilance, ce qui aurait pu constituer une "négligence grave" selon l'article L. 133-19 du Code monétaire et financier, laquelle négligence grave aurait pu permettre à la banque de s'exonérer de son obligation de remboursement des sommes détournées.
Cette décision est historique, car l’arrêt de la Cour d’appel de Versailles était un arrêt précurseur, intervenu très tôt dans le développement de cette fraude au spoofing (faux conseiller bancaire), dont les jours sont peut être désormais comptés, puisque depuis le 1er octobre 2024, une sécurisation des réseaux de services de télécommunications devrait empêcher l’usurpation des numéros de téléphone des établissements bancaires.
Cette décision de la Cour de cassation est la première décision de la Cour de cassation en qui statue spécifiquement sur la question du spoofing bancaire dans le domaine de la responsabilité bancaire.
Il vient harmoniser des décision parfois contradictoires entre certaines Cours d'appels, puisque toutes les Cours ne semblait pas adopter la même position que la Cour d'appel de Versailles.
Cette décision s'inscrit dans l'esprit des textes européens et français, qui prévoient un véritable droit à remboursement de la victime de fraude bancaire, sous la seule réserve d'une négligence grave, qui implique un comportement anormalement imprudent de la part de la victime, ce qui n'est pas le cas en matière de spoofing puisque le procédé est très élaboré et crédible (on est loin du cas où la personne communiquerai ses codes de cartes bancaires, ou effectuerai un paiement sans vérifier si l'origine de la demande de paiement).
La Cour confirme ainsi que l'usurpation de l'identité d'un conseiller via des méthodes sophistiquées peut légitimement tromper un client prudent.
Cet arrêt est une avancée majeure pour les victimes d'arnaques au faux conseiller bancaire.
En posant le principe selon lequel une victime de spoofing n'est pas automatiquement tenue pour négligente, la Cour de cassation ouvre la voie à une meilleure protection des clients dans les cas similaires.
Pour les banques, cet arrêt impose une vigilance accrue dans les mesures de sécurité et une responsabilité renforcée face aux fraudes par spoofing.
En effet, elles devront non seulement mettre en place des systèmes de détection plus fiables, mais aussi sensibiliser leurs clients aux risques de telles escroqueries bancaires, ce qui est déjà le cas en pratique, puisque depuis quelques mois, voire quelques années, chacun peut constater sur en consultant son espace en ligne ou l’application de sa banque que des doubles, voire des triples vérification sont effectuées, et des fenêtres pop-up s’affichent pour alerter le client sur le risque d’escroquerie au faux conseiller bancaire (spoofing).
En matière de contentieux bancaire, cet arrêt est un signal fort pour les établissements financiers, les incitant à réviser leurs politiques de remboursement pour les victimes de fraudes, dès lors qu’elles démontrent qu'elles n’ont commis aucune imprudence notable.
Ce cadre permet aux clients de contester plus facilement les décisions bancaires et de demander un remboursement en cas de spoofing.
Cet arrêt de la Cour de cassation est une nouvelle pierre à l’édifice de la responsabilité bancaire.
Cet arrêt fait jurisprudence et marque une étape essentielle en établissant un précédent.
Les victimes de fraudes sophistiquées peuvent désormais s'appuyer sur cette jurisprudence pour défendre leurs droits et revendiquer des remboursements en cas de pertes financières dues au spoofing.
La notion de "négligence grave" devra désormais être examinée de manière plus rigoureuse, et ne pourra pas être invoquée de manière automatique pour refuser un remboursement.
En confirmant la décision de la Cour d’appel de Versailles et en rejetant le pourvoi de BNP Paribas, la Cour de cassation renforce les droits des victimes de fraudes bancaires.
Cet arrêt envoie un message clair : les banques ne peuvent plus se dédouaner systématiquement en invoquant la négligence grave des clients, surtout lorsque le spoofing est en cause.
Les victimes d'arnaques au faux conseiller bancaire disposent désormais d'une jurisprudence solide pour faire valoir leurs droits.
Maître SALAGNON, Avocat associé au sein du cabinet BRG Avocats (Nantes-Paris), et responsable du département droit économique, droit bancaire, vous conseille, vous assiste et vous accompagne sur toute la France concernant vos litiges portant sur des fraudes au SPOOFING (Faux conseiller bancaire).
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