Bancaire & voies d’exécution - 10/12/2025
Tribunal judiciaire de Bordeaux, jugement du 2 juin 2025
Dans cette affaire jugée en juin 2025, une consommatrice s’est retrouvée fichée au FICP, poursuivie pour rembourser un prêt de 15.000 €, qu’elle n’avait jamais demandé, ni signé.
Comment est ce possible?
Ce sont les nouvelles fraudes en vogue : un escroc va signer ou faire signer un contrat de crédit à une victime sans qu'elle en ait conscience.
Selon la banque prêteuse, tout semblait en règle : contrat signé électroniquement, pièces justificatives fournies, versement sur son compte bancaire.
Pourtant, la réalité était toute autre : elle avait été victime d’une usurpation d’identité, trompée par de faux courtiers sous couvert de rachat de crédit à la consommation (souvent des crédits finançant l'achat d'une pompe à chaleur ou de panneaux photovoltaïques)
Les fond sont été débloqués sur son compte et l’escroc lui a ensuite fait virer l’argent sur un compte tiers. (appelé également faussement compte séquestre)
Après avoir déposé plainte, elle a assigné la banque devant le Tribunal pour demander que le contrat lui soit déclaré inopposable.
La banque prétendait que le contrat avait été signé électroniquement via la plateforme DocuSign, outil reconnu par l’ANSSI (Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information).
Mais le juge a relevé plusieurs manquements :
- Aucune preuve que la signature utilisée était une signature électronique qualifiée, seule à bénéficier d’une présomption de fiabilité.
- Aucune vérification d’identité réelle du signataire n’a été apportée.
- Les coordonnées utilisées (mail et téléphone) n’étaient pas celles de la cliente.
- Le prestataire de signature n’a pas établi les étapes détaillées du processus.
Car on ne le sais pas assez, mais une signature electronique n'est pas plus fiable qu'une signature manuscrite et elle est même à bien des égards plus fragile.
Le Tribunal a donc jugé que la signature ne pouvait être attribuée à la consommatrice : elle n’avait pas signé le prêt.
Le juge a conclu sans ambiguïté que le contrat est inopposable à la victime.
En d'autres termes, elle n'est pas tenue de rembourser le prêt, car elle n’en est pas signataire, malgré le versement des fonds sur son compte.
Le tribunal a rappelé un principe fondamental du droit des contrats : « Les conventions n’ont d’effet qu’entre les parties contractantes » (article 1199 du Code civil).
Ici, la cliente n’était pas partie au contrat.
La banque a été condamnée à :
- rembourser 472,21 €, correspondant aux échéances déjà prélevées sur le compte de la victime,
- retirer immédiatement son inscription au FICP (fichage Banque de France),
- payer une astreinte de 50 € par jour en cas de retard de radiation.
La somme initiale réclamée par la banque s’élevait à plus de 16.000 €.
Finalement, la victime n'aura pas à rembourser ce prêt, même si les sommes ont transité par son compte.
La banque a tenté d'engager la responsabilité de la victime sur cet aspect, mais sans succès.
Ce jugement est riche d’enseignements pratiques pour toute personne victime d’une usurpation d’identité dans un contrat bancaire.
La simple présence d’une signature électronique ne suffit pas : encore faut-il que la banque démontre son authenticité et sa fiabilité.
Les établissements de crédit sont tenus à une obligation de vigilance : ils doivent vérifier rigoureusement l’identité de leurs cocontractants.
Le versement sur le compte d’une victime ne crée pas automatiquement une dette, surtout si la personne prouve avoir été trompée.
Ce jugement montre que les tribunaux peuvent protéger les consommateurs, mais exigent que chaque preuve soit solidement étayée.
L’usurpation d’identité est une réalité fréquente dans les crédits en ligne : les plateformes de signature, les prêteurs et les courtiers doivent redoubler de vigilance.
Les victimes doivent être accompagnés par un avocat professionnel du droit et de ce domaine pour défendre leurs intérêts face aux établissements bancaires.
Maître SALAGNON, Avocat associé au sein du cabinet BRG Avocats (Nantes-Paris), et responsable du département droit bancaire, droit de la consommation, droit des contrats, vous conseille, vous assiste et vous accompagne sur toute la France concernant vos litiges.
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