Responsabilité de la banque et chèques émis

Bancaire & voies d’exécution - 13/04/2020

La jurisprudence vient préciser les conditions dans lesquelles le banquier doit vérifier les chèques encaissés

La jurisprudence vient préciser les conditions dans lesquelles le banquier doit vérifier les chèques encaissés, notamment lorsque deux bénéficiaires sont mentionnés.


C’est assez rare, mais il arrive que le chèque mentionne deux bénéficiaires.


Dans ce cas, quelles sont les obligations des banques ?


Les banques sont-elles tenues de vérifier les chèques encaissés ?


Les banquiers sont tenus au respect de plusieurs obligations de vérification des chèques qui leur sont remis à l’encaissement.


Deux banques interviennent au moment de l’encaissement d’un chèque : celle du bénéficiaire du chèque, et celle de l’émetteur du chèque.


Pour sa part, la banque du bénéficiaire du chèque est tenue de vérifier les anomalies apparentes qui figurerait sur le chèque.


La banque présentatrice doit ainsi vérifier les anomalies matérielles qui viendraient affecter le chèque lui-même tel un défaut de signature de l’émetteur mais également les anomalies intellectuelles qui pourraient être détectées par une analyse du banquier comme un montant anormalement élevé par rapport aux chèques habituellement émis par le débiteur en question.


C’est ce que vient rappeler la Cour de cassation dans son arrêt du 27 novembre 2019, tout en précisant ce qu’il faut entendre par anomalie apparente (Cass. Com, 27 novembre 2019, n°18-11.439).


En l’espèce, un associé d’une société a souscrit des contrats d’assurance-vie auprès d’un agent d’une société d’assurance.


Cinq chèques ont été établis par cette société à l’ordre de la société d’assurance et ces derniers ont été encaissés à son profit par l’agent général de la société d’assurance sur un compte personnel.


L’associé ainsi que la société émettrice des chèques ont assigné la société d’assurance en qualité de mandante de l’agent en remboursement des sommes détournées par celui-ci.


La société d’assurance a pour sa part recherché la responsabilité de la banque de la société émettrice des chèques (banque tirée) ainsi que de la banque dans laquelle l’agent disposait de son compte (banque présentatrice).


La Cour d’appel rejette la demande de la société d’assurance de son appel en garanti contre la banque tirée considérant que cette dernière n’a commis aucune faute.


La Cour condamne cependant la banque présentatrice à garantir la société d’assurance à concurrence de la moitié des condamnations prononcées contre elle car elle a commis une faute en procédant à l’encaissement des chèques litigieux à la demande d’un seul des deux bénéficiaires.


La société d’assurance forme un pourvoi en cassation.


  • Le devoir de vérification limité de la banque émettrice d’un chèque ayant un double bénéficiaire.


Un chèque peut tout à fait être établi à l’ordre de deux personnes distinctes.


En effet, la Cour de cassation vient rappeler que la juxtaposition des noms de deux bénéficiaires sur un chèque n’est pas en soi une anomalie apparente qui devrait provoquer des contrôles particuliers.


Par ailleurs, la banque tirée n’a pas à rechercher l’accord de son client sur le fait que le chèque soit versé à l’un ou l’autre des bénéficiaires et n’a pas non plus à s’assurer du consentement du bénéficiaire du compte sur lequel le chèque n’est pas versé.


La Cour de cassation, à l’image de l’arrêt rendu en appel, ne retient pas une quelconque faute de la part de la banque tirée, qui a pour rôle de verser la provision entre les mains de la banque présentatrice.


Elle énonce alors que cette dernière n’est tenue ni de vérifier auprès du tireur, la sincérité de la mention, ni de s’assurer du consentement de l’autre bénéficiaire.


La banque tirée peut donc s’abstenir de ces vérifications sauf s’il existe une anomalie apparente, matérielle ou intellectuelle.


Cependant, la banque qui encaisse le chèque peut être mise en cause si elle crédite le chèque sur le compte d’un des bénéficiaires sans demander l’autorisation de l’autre.


  • Le devoir de vérification élargi incombant à la banque présentatrice


La Cour de cassation retient un devoir de vérification plus important pour la banque qui encaisse le chèque.


Elle précise que la banque présentatrice, en ce qu’elle est la banque qui a le rôle de créditer le montant du chèque déposé sur le compte du ou des bénéficiaires du chèque en question, doit s’assurer du consentement du second bénéficiaire quand le chèque est remis par seulement l’un des deux bénéficiaires pour encaissement à son seul profit.


Ainsi, elle fait peser une charge supplémentaire sur la banque présentatrice vis à vis de la banque tirée, en ce qu’elle a le devoir de s’assurer du consentement des différents bénéficiaires.


Dès lors, son devoir va plus loin que la simple vérification de la régularité formelle du chèque.


En effet, dans un arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation en date du 17 septembre 2013, la Haute Cour avait déjà précisée que :


« la banque présentatrice est tenue de détecter les anomalies apparentes d'un chèque qu'elle est chargée d'encaisser pour le compte de son client et qu'en s'en abstenant elle prend un risque dont elle doit assumer les conséquences ».


Toutefois, en l’espèce, la Haute juridiction vient nuancer son propos en indiquant que cette obligation ne lui incombe pas quand des circonstances particulières lui permettent de tenir pour acquis le consentement du bénéficiaire qui n’a pas remis le chèque pour encaissement.


Dans cette circonstance très particulière dans laquelle l’agent agissait pour le compte de la compagnie d’assurance, la Cour d’appel ne pouvait pas, pour la Cour de cassation, condamner la banque présentatrice à garantir la société d’assurance à concurrence de la moitié des condamnations prononcées contre cette dernière sans rechercher si la banque inquiétée avait en effet pu considérer comme acquis le consentement de la société d’assurance qui était le second bénéficiaire du chèque.


En effet, l’agent pouvait très bien agir sous le mandat de cette dernière.


Maître SALAGNON, Avocat associé au sein du cabinet BRG Avocats (Nantes-Paris), et responsable du département droit économique, droit de la consommation, droit des contrats, vous conseille, vous assiste et vous accompagne sur toute la France concernant vos litiges portant sur les litiges bancaires et les litiges portant sur des chèques. Pour le contacter, appelez-le au 02.40.89.00.70, ou prenez contact au moyen du formulaire de contact afin qu’une réponse vous soit apportée dans les meilleurs délais.

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